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Photos, poésie, extraits de livre
A demeurer ainsi au bord d'un soir (Joël Vernet)
Deux peupliers centenaires s'élèvent vers le ciel.
On dirait deux suppliques un peu fières,
Danseurs que je regarde tout l'azur dans les yeux.
Ce bleu où passent les plumes des nuages,
Caresse désinvolte à vos très hautes branches.
Des larmes d'argent sont posées sur vos feuilles.
Elles brillent au soleil.
Assis dans l'herbe d'un été,
Les yeux tout simplement ouverts
Sur le très vaste monde qu'un orage grondera doucement.
Une mésange non craintive picore les pages de mon livre.
Un rouge-gorge n'ose point l'aventure.
D'autres oiseaux tissent des voyages dans le ciel.
Mes pensées sont dans l'herbe
Et je ne pense à rien.
Joël VERNET
Une barque passe près de ton seuil
les mots (Charles JULIET)
19 octobre
Si je dis que les mots nous servent à nous exprimer et à communiquer, je dis ce que tout le monde sait. Pourtant, il m'arrive souvent de m'étonner que nous puissions déposer en eux ce que nous sommes, éprouvons, pensons, imaginons..., qu'ils aient le pouvoir de transmettre à autrui ce que nous leur confions. Certes, il se produit une regrettable déperdition entre ce qui est vécu et ce qui est transmis, mas cela, nous l'oublions. Parler de cet étonnement, c'est peut être rejoindre celui que j'ai pu connaître quand j'étais enfant.
Ecrire , pour un écrivain, c'est avoir le goût des mots, c'est les ressentir, c'est aimer les agencer, c'est percevoir comment ils interagissent les uns sur les autres, c'est être à même d'apprécier leur poids, leur couleur, leur sonorité, leurs vibrations... C'est aussi posséder de nombreux micro-savoirs qui aient à faire vivre ensemble ces petits êtres vivants qui ne se laissent pas facilement domestiquer.
Charles JULIET
Gratitude
Journal IX - 2004/2008
défi 246 avec ABC JARDIN DES MOTS
Pour ce défi n° 246, voici ce que nous demande ABC (Jardin des Mots)
S.O.S jardinier : Cher Amiral, vos croqueurs sont des « motivores », en passant par mon jardin, ils ont dévoré tous mes mots. Sans mot, mon jardin de mots n’a plus de sens, il est anéanti. Demandez-leur, je vous en conjure, de m’envoyer chacun sa meilleure recette, pour que les mots de mon jardin puissent refleurir dès le début du printemps.
Consigne : Écrire une recette simple et efficace pour réparer les dégâts provoqués par tous les « motivores ».
RECETTE pour réensemencer un jardin dévasté
(attention, à ne suivre qu'en cas de réel anéantissement)
Prier un soir de "Grande Librairie"
Invoquer l'aide du grand Saint François de Sales, patron des écrivains et des journalistes, Alexandre Dumas, Boris Vian et Andrée Chedid.
Et promettre de remplir, en cas de réussite, la boîte à livres la plus près du jardin.
Choisir avec soin les ingrédients
un livre de poésie (à votre convenance les poèmes de Ronsard, Emilie Dickinson ou Cécile Coulon),
des graines de tournesol (voir chez un grainetier),
un journal ou un magazine (Lire ou Causette ou Spirou)
et une bonne dose d'épices à votre convenance (poivre, vanille, cannelle, gingembre ...)
pour terminer, un livre aimé (il permet de doubler les mots à venir).
Préparation
Mélanger les graines de tournesol avec le journal ou le magazine découpé en très petits morceaux, et ajouter la dose d'épices.
Choisir deux ou trois poèmes que vous déclamerez dans votre jardin, semer le mélange de graines de tournesol, journal ou magazine, épices.
Puis, durant un mois, chaque soir avant la tombée de la nuit lire une page du livre aimé. En cas de pluie prenez si vous le souhaitez un parapluie.
Lorsque les graines de tournesol sortiront du sol, surtout ne pas chercher à éliminer les autres plantes (pissenlits, plantain, pâquerettes, et autres). Laissez le soleil, le vent, la pluie leur apprendre ce qu'est la vie.
Dès que les petits soleils grandiront, grandiront, s'ouvriront, se laissant aimer par les abeilles, des graines sortiront les mots qui commenceront à voleter, à jacasser, se mélangeront, et vous pourrez enfin sourire.
Prendre un panier, ne pas omettre de vous couvrir d'un chapeau de paille et cueillez-les, amoureusement, délicatement et votre jardin sera repeuplé de mille et mille mots.
Dernière recommandation
Laissez entrer les croqueurs de mots avec un joli masque en dentelle sur la bouche et avec 4 ou 5 mots de leur jardin. Ensemble, les mots deviendront amis et prospèreront.
Jeudi en poésie avec ABC, Jardin des mots
avec les croqueurs de mots
Thème du jeudi poésie 2 : Nid(s)
NID
Grondement des humains,
confiner, ne pas confiner,
variants anglais et autres,
élections à la proportionnelle.
Chants des pies, moineaux
joyeux d'un printemps
à venir, à s'aimer.
Préparer un nid futur.
Dégel des eaux urbaines,
royaux perce-neige,
verdure des jonquilles.
La femme taille la vigne
Ample souffle de la Vie.
Agab (02/21)
Jeudi en poésie avec ABC, Jardin des mots
Avec les Croqueurs de mots
Thème du Jeudi en poésie 1 : Bourgeon(s)
Bourgeons
mardi gras 2021
humains masqués
Policier avec jumelles
Le temps s'adoucit
après les jours glacés
La pie a une branche
dans son bec,
3 autres courtisent
une demoiselle.
Et les jonquilles ?
Elles se préparent
Et les arbres ?
Quelques bourgeons
Tentation de printemps
Agab (02/21)
la joie (Charles Pépin)
Pendant toutes ces années, j'ai vécu sans rien fabriquer. Ca ne me manquait pas, je ne m'en rendais pas compte. Aujourd'hui, quand je repense à mon métier, je le vois comme ça ; vendre du vent en faisant des moulinets avec les mains. Je pense à la ville, si proche, là-bas derrière les murs : la ville est pleine de marchands de vent. On les attache à leur poste en échange d'un salaire, pendant des heures, des mois, pendant des années ; ils en oublient de se demander ce qu'ils ont fait, s'ils ont eu simplement un métier.
LA JOIE
Charles Pépin
la beauté de l'amour (Jiddu KRISHNAMURTI)
... Qu'est ce que la beauté ?
La beauté est-elle dans l'objet ou dans l'œil de celui qui regarde ? Ou la beauté n'est-elle ni dans l'objet ni dans celui qui regarde, mais dans l'abandon total de l'observateur et l'observé ?
L'abandon total n'est possible que dans l'austérité totale, qui n'est pas l'austérité du prêtre avec sa dureté, ses sanctions, ses règles et son obéissance. L'austérité c'est la simplicité, pas celle des idées, des vêtements, de la conduite ou de la nourriture : être tout à fait simple, c'est l'humilité absolue.
Alors il n'y a jamais rien à atteindre, alors il n'y a jamais de réussite, alors il n'y a pas d'échelons à gravir - il n'y a que le premier pas et le premier pas est le pas qui n'a jamais de fin.
LA BEAUTE DE L'AMOUR
Ecouter, c'est aimer
Jiddu KRISHNAMURTI
Je ne reverrai plus le monde (Ahmet ALTAN)
Pendant des mois je n'ai pas vu ni effleuré le moindre livre.
Interdiction de faire venir des livres "de l'extérieur". Dans la prison il y avait bien une bibliothèque, mais elle était fermée.
J'ai grandi dans une maison pleine de livres. J'ai passé toute mon enfance parmi eux. Les livres étaient comme des fées au milieu d'une forêt qui me semblait oppressante, effrayante, et à cette forêt dont la nature profonde m'échappait, j'aimais mieux les charmes scintillants des fées, leur ravissant mystère et leurs sourires pleins de promesses.
...
Il te suffit de poser le regard sur cette flopée de signes minuscules étalés sur le papier et aussitôt, ils s'animent, pétillent, changent de forme, sans cesse, tour à tour villes inconnues, ruelles étroites, roches escarpées, déserts, palais. Une poudre magique ruisselle sur ton front et soudain, te voilà quelqu'un d'autre, te voilà Peter Pan, ou le chevalier de Pardaillan, Arsène Lupin, Sherlock Holmes, Ivanhoé, Lancelot !
J'ai passé toute mon enfance à jouer avec les fées de la forêt. Leur présence m'était familière, je m'étais habitué à les avoir toujours auprès de moi, même dormant entre les pages, prêtes à danser l'instant où j'ouvrirais le livre. Même dans leur sommeil, j'aimais les contempler.
JE NE REVERRAI PLUS LE MONDE
textes de prison
Ahmet ALTAN
Je ne reverrai plus le monde (Ahmet Altan)
A l'approche du printemps, les oiseaux reviennent, ils font leurs nids dans les creux du grillage qui surplombe la cour.
Ils chantent, pépient joyeusement.
Quand vient la saison des amours, les mâles pour courtiser les femelles et prendre nid avec elles, leur apportent des fleurs qu'ils ont cueillies dans les champs qui entourent la prison. Marguerites délicates, encore à peine écloses, à la tige gracile, aux pétales comme une couronne de dentelle.
Elles nous tombent du ciel dans la cour. Aussitôt ramassées, nous les mettons dans une bouteille de soda à moitié remplie d'eau. Et déposons ce vase improvisé au centre de la table.
Le lendemain matin, les matons nous l'enlèvent. Les fleurs sont interdites en prison.
Je ne reverrai plus le monde
(textes de prison)
Ahmet ALTAN