• Je vais m'exprimer autrement : un artiste doit il s'adapter à la stupidité de ceux qui l'entourent ?

    L'hostilité de ces ultimes propos dissipa toute gêne chez moi. 

    En insultant l'intelligence des gens, vous perdez toute chance de les éduquer, et en refusant la justesse de leur point de vue, vous vous privez vous-même de l'intérêt principal de créer des oeuvres artistiques.

    Ce fut Ebrahim Golestan qui reprit la parole.

    Qui est ?

    Établir un lien, dis je. Pas juste entre une idée et une autre, mais entre les gens.

    Jasmin Darznik

    L'oiseau captif

     

    ce livre raconte l'histoire de la poétesse iranienne Forough Farrokhzad (1935/1967)

     

    Tanha sedast ke mimanad - Il n’y a que la voix qui reste

     

    Pourquoi m’arrêterais-je, pourquoi?

    Les oiseaux sont partis en quête d’une direction bleue

    L’horizon est vertical

    L’horizon est vertical, le mouvement une fontaine

    Et dans les limites de la vision

    Les planètes tournoient lumineuses

    Dans les hauteurs la terre accède à la répétition

    Et des puits d’air

    Se transforment en tunnels de liaison.

    Le jour est une étendue,

    Qui ne peut être contenue

    Dans l’imagination du vers qui ronge un journal

    Pourquoi m’arrêterais-je?

    Le mystère traverse les vaisseaux de la vie

    L’atmosphère matricielle de la lune,

    Sa qualité tuera les cellules pourries

    Et dans l’espace alchimique après le lever du soleil

    Seule la voix

    Sera absorbée par les particules du temps

    Pourquoi m’arrêterais-je?

    Que peut être le marécage, sinon le lieu de pondaison des insectes de pourriture

    Les pensées de la morgue sont écrites par les cadavres gonflés

    L’homme faux dans la noirceur

    A dissimulé sa virilité défaillante

    Et les cafards...ah

    Quand les cafards parlent!

    Pourquoi m’arrêterais-je?

    Tout le labeur des lettres de plomb est inutile,

    Tout le labeur des lettres de plomb,

    Ne sauvera pas une pensée mesquine

    Je suis de la lignée des arbres

    Respirer l’air stagnant m’ennuie

    Un oiseau mort m’a conseillé de garder en mémoire le vol

    La finalité de toutes les forces est de s’unir, de s’unir,

    À l’origine du soleil

    Et de se déverser dans l’esprit de la lumière

    Il est naturel que les moulins à vent pourrissent

    Pourquoi m’arrêterais-je?

    Je tiens l’épi vert du blé sous mon sein

    La voix, la voix, seulement la voix

    La voix du désir de l’eau de couler

    La voix de l’écoulement de la lumière sur la féminité de la terre

    La voix de la formation d’un embryon de sens

    Et l’expression de la mémoire commune de l’amour

    La voix, la voix, la voix, il n’y a que la voix qui reste

    Au pays des lilliputiens,

    Les repères de la mesure d’un voyage ne quittent pas l’orbite du zéro

    Pourquoi m’arrêterais-je?

    J’obéis aux quatre éléments

    Rédiger les lois de mon coeur,

    N’est pas l’affaire du gouvernement des aveugles local

    Qu'ai-je à faire avec le long hurlement de sauvagerie?

    De l’organe sexuel animal

    Qu'ai-je à faire avec le frémissement des vers dans le vide de la viande?

    C’est la lignée du sang des fleurs qui m’a engagée à vivre

    La race du sang des fleurs savez-vous?

     

    Forough Farrokhzâd 

     

    Merci à Gisèle pour la découverte de cette poète et aussi pour cette auteure qui rend si bien sa vie. Ses parents sont partis d'Iran pour se réfugier aux Etats Unis emportant dans leur valise, un livre de poèmes de Forough.


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  • Apprendre à aimer votre voisin

     

    Tous. Pas seulement ceux qui font leurs courses le matin,

    le promeneur du chien qui glousse, les couples

    avec leurs enfants fraises des bois. Ceux-là sont la base.

     

    Affichez votre bonté rebelle en lettres beaucoup trop grandes

    au dos de votre veste. Les enfants vous dévisageront,

    les chiens aboieront.  Les portes claqueront. Peu importe, avancez.

     

    Vos semelles s'useront, puis vos genoux.

    Vous sentirez le froid de toutes parts, l'absence de pluie.,

    une sécheresse de bienfaits. Votre visage effacé.

     

    Non loin, derrière les rideaux couleur terre, une femme

    qui met son hidjab - se préparer à affronter la rue

    du jour - appellera son mari : Viens voir.

     

    Ces deux-là s'agenouilleront à leur fenêtre.

    La miséricorde  porte des éclairs en bandoulière. Elle a des reflets

    de feu dans ses cheveux blancs. Le visage du soleil.

     

    Barbara Kingsolver

    Apprendre à voler (en dix mille leçons faciles)

     

     


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  • perce-neige

     

    Sais-tu ce que je fus ? Comment je vécus ? Toi qui sais

    ce qu'est le désespoir ; alors,

    l'hiver devrait avoir un sens pour toi.

     

    Je ne m'attendais pas à survivre,

    la terre m'ayant supprimé. Je ne m'attendais pas à

    me réveiller à nouveau, sentir

    dans la terre humide mon corps 

    capable de réagir à nouveau, se  souvenir 

    après si longtemps comment éclore à nouveau 

    dans la lumière froide 

    du printemps précoce -

     

    apeuré, oui, mais à nouveau parmi vous 

    à pleurer, oui, risquer la joie 

     

    dans le vent cru du nouveau monde.

     

    Louise Glück 

    L'iris sauvage

     

     

     

     

     

     

     

     


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  • FECONDE 

    (juin 2005)

     

    Parfois l'esprit féconde

    D'innombrables créations

     

    Au temps de ma jeunesse

    J'étais inépuisable

    Fructueuse

    Productive

    Productrice

    J'épousais tous les temps

     

    Maintenant sans promesses

    Recherchant ce temps

    Recherchant un lieu

    Je suis partout

    Je suis nulle part.

     

    Andrée CHEDID

    (l'étoffe de l'univers)

     


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  • Qui sommes nous ?

     

    Qui est au corps

    De son corps

    De son âme

    De son être

    Qui est au logis

    dans l'intime de l'Etre ?

    Et veille sur la demeure ?

    Qui ?

     

    Qui 

    Dans la demeure du coeur

    Ou de l'âme

    A conscience du secret de nos vies ?

     

    Qui prête attention à moi ?

    Qui s'enferme au logis ?

    Qui observe les fonds ?

     

    Qui

    dans l'intensité première 

    Au centre de nous-mêmes

    Prête attention à Lui ?

     

    Andrée CHEDID

    l'étoffe de l'univers

     


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