nous ne savons jamais dans quelle direction la vie nous emporte (Jon Kalman Stefansson)
Nous ne savons jamais dans quelle direction la vie nous emporte, ne savons jamais qui survivra à la journée et qui y succombera, nous ne savons pas si le dernier adieu sera un baiser, une parole amère, un regard blessant, il suffit que quelqu'un ait un moment d'inattention, qu'il oublie de regarder à droite pour qu'il meure, et alors il est trop tard pour retirer des paroles malheureuses, trop tard pour dire pardonne-moi, trop tard pour dire ce qui compte, ce que nous voulions dire, mais que nous ne pouvions pas articuler à cause de notre cruauté, notre fatigue, notre routine, du temps qui manque, tu as oublié de regarder à droite, je ne te verrai plus jamais et les mots que m'as dits continuerons de résonner en moi chaque jour et chaque nuit..
Edmond est parti dimanche dernier, Edmond qui après le décès de son épouse, Marguerite, s'était remis de toute sa fatigue d'aidant et d'aimant. Edmond avait 92 ans, toujours vif, conduisant encore sa voiture pour les courses dans le quartier, demandant où trouver une bouillote pour réchauffer ses pieds dans son lit la nuit. Edmond avait souvent un petit sourire humoristique et une étoile dans ses yeux.
Demain matin, nous nous retrouverons ensemble,
Gabriel, Véronique, Robert et Olivier et toute sa famille pour lui dire A Dieu !
Il longe d'abord un sentier plus ou moins damé, la pente est douce vers l'église perchée sur une petite éminence qui surplombe les maisons éparses ainsi que le cimetière empli de vies disparues, d'os et de chair pourrissants, nous conservons la mort sous terre et lentement elle se transforme en humus, le domaine des vers, puis en végétation. L'été, l'herbe est une chanson verdoyante, peut-être ce chant là est-il l'éternité de l'homme.
Jon Kalman STEFANSSON
(Le coeur de l'homme)